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Un projet de mosquée échangé contre un hôpital : entre malentendus et promesses non tenues

Redigé par Alain-Bertrand Tunezerwe
Le 19 septembre 2024 à 09:09

L’emplacement de l’actuel hôpital de Nyarugenge, aujourd’hui un établissement de référence pour les soins de santé, devait initialement accueillir un projet majeur : la construction de la Grande Mosquée Nationale. Ce changement a généré des tensions au sein de la communauté musulmane, certains membres affirmant avoir été dépossédés de leur terrain, tandis que d’autres suggèrent qu’il pourrait avoir été vendu par leurs propres dirigeants.

Retour sur les faits : du projet de mosquée à l’hôpital de Nyarugenge

Le projet de construction de l’hôpital de Nyarugenge, un hôpital de district moderne, a été lancé en 2018 et a ouvert ses portes en mai 2020. Ce développement a significativement amélioré la vie des Rwandais, en particulier ceux résidant à Kigali, en leur offrant des infrastructures sanitaires de qualité. Cependant, une partie de la communauté musulmane avait un autre rêve pour cet emplacement : y voir s’élever une mosquée emblématique.

En 2012, l’Association Musulmane du Rwanda avait annoncé un projet de construction de la Grande Mosquée Nationale sur ce même terrain. Une collecte de fonds avait immédiatement été lancée pour financer l’initiative, suscitant de grands espoirs parmi les fidèles.

L’utilisation antérieure du terrain : un ancien cimetière musulman

Avant que ce projet de mosquée ne soit envisagé, le terrain était utilisé comme cimetière pour la communauté musulmane. Cependant, ce cimetière étant devenu complet, il a été proposé, conformément à la loi, de réaffecter le terrain après une période de 20 ans depuis le dernier enterrement. C’est dans ce contexte qu’a émergé l’idée de construire une mosquée à cet emplacement.

Clarifications du Mufti du Rwanda sur la propriété du terrain

Dans une récente interview avec IGIHE, le Mufti du Rwanda, Sheikh Mussa Sindayigaya, a abordé cette question complexe et a clarifié les malentendus sur la propriété du terrain. Il a expliqué que, contrairement à ce que certains croyaient, le terrain appartenait à l’État et non à l’Association Musulmane du Rwanda (RMC). Cette confusion a perduré en raison d’un manque d’informations précises.

Il a précisé : « Ce terrain était effectivement un cimetière où les musulmans enterraient leurs morts, mais il n’a jamais été la propriété de l’Association Musulmane. Il s’agissait d’un terrain appartenant à l’État. Un cimetière, à moins d’avoir été acheté en tant que propriété privée, reste la propriété de l’État, qui en a accordé l’usage à la communauté pour les services d’inhumation. »

Il a également souligné que, bien que l’Association Musulmane ait officiellement demandé l’attribution du terrain pour la construction d’une mosquée, aucune réponse formelle n’avait été donnée à cette demande. À la place, un autre projet d’État, jugé prioritaire, a été mis en œuvre : la construction de l’hôpital de Nyarugenge.

« Lorsque le cimetière est devenu complet et après la période légale de 20 ans, l’État a récupéré le terrain. L’Association Musulmane avait demandé au maire de Kigali de leur attribuer ce terrain pour y construire une mosquée, mais aucune réponse officielle n’a été donnée. Un autre projet, également nécessaire, a été priorisé par l’État. Cela a conduit certains à penser que le terrain avait été volé, mais il n’a jamais appartenu à la communauté musulmane, » a-t-il ajouté.

Qu’en est-il des contributions financières des fidèles musulmans ?

L’annonce du projet de construction de la Grande Mosquée avait suscité une vague de générosité au sein de la communauté musulmane, de nombreux fidèles promettant des contributions financières pour sa réalisation. Selon les informations obtenues par IGIHE, les promesses de dons atteignaient environ 60 millions de francs rwandais.

Cependant, comme l’a expliqué le Mufti Sheikh Musa Sindayigaya, la réalité a été quelque peu différente. « Beaucoup de gens avaient promis de contribuer, mais dans le domaine de la construction, les contributions financières importantes sont souvent versées une fois les travaux effectivement commencés. Certains disaient : ‘Je donnerai lorsque vous commencerez les travaux’, mais peu ont effectivement versé leur contribution en argent liquide. »

En fin de compte, seulement 20 millions de francs rwandais ont été collectés en espèces. Sheikh Salim Hitimana, l’ancien Mufti, avait informé la communauté musulmane lors de la fête de l’Aïd que ces 20 millions étaient conservés sur le compte de l’Association, en attente du lancement du projet.

Un nouveau projet à l’horizon : la Grande Mosquée à Kacyiru

Actuellement, un nouveau projet de construction d’une Grande Mosquée et du siège de l’Association Musulmane du Rwanda est prévu dans le district de Gasabo, à Kacyiru. Les fonds collectés pour le précédent projet seront utilisés pour cette nouvelle initiative.

« Nous confirmons que, lorsque nous lancerons ce projet, les fonds déjà collectés seront utilisés en priorité et la communauté musulmane sera informée de leur usage. Nous demanderons ensuite de nouvelles contributions pour poursuivre le projet, en espérant que ceux qui avaient fait des promesses les honoreront. Cependant, nous ne souhaitons pas précipiter les annonces avant le début concret des travaux, » a précisé Sheikh Sindayigaya.

De la déception à une nouvelle opportunité

Bien que le projet initial de la Grande Mosquée sur le site de l’hôpital de Nyarugenge n’ait pas vu le jour, un nouveau projet se dessine pour la communauté musulmane à Kacyiru. Les fonds déjà collectés seront employés pour concrétiser cette nouvelle ambition, offrant à la communauté une nouvelle opportunité de construire un lieu de culte emblématique. Les malentendus sur la propriété du terrain de Nyarugenge ont été clarifiés, et le dialogue ouvert devrait permettre de tourner la page de cette période de confusion et de tension.

Le projet de construction de l'hôpital de Nyarugenge, un hôpital de district moderne, a été lancé en 2018 et a ouvert ses portes en mai 2020.

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